Improvisation, démarche, parcours et citations
Ateliers d’improvisation pour musiciens et comédiens
Quelques éléments sur la démarche suivie
Le travail proposé s’ouvre sur plusieurs champs que ce soit pour des réalisations musicales ou bien comme outil pédagogique pour un apprentissage musical. L’approche en est toujours pratique en partant de l’expérience physique du son.
Il est difficile de décrire précisément une recherche qui se développe dans l’instant et dépend de chaque individu, de chaque groupe, du projet et du temps imparti.
Malgré cela, il est au moins possible de définir certains des points abordés et comment ils sont traités. Tout en sachant que tout systématisme nous éloignera forcément de la voie individuelle recherchée.
Un premier temps est basé sur deux axes principaux :
L’extériorisation des acquis musicaux personnels, qu’ils soient conscients ou non (comme chez bon nombre de comédiens) l’“accord” du groupe, particulièrement dans le son et les harmoniques qu’il dégage.
C’est à partir de là qu’une recherche spécifique pourra s’élaborer et se développer, avec toujours comme perspective principale l’autonomie de l’interprète. Il doit prendre lui-même conscience du chemin qu’il veut découvrir et des éléments techniques qu’il doit acquérir ou affiner pour réaliser son chant intérieur.
Techniquement divers paramètres musicaux sont systématiquement explorés, isolément ou conjointement :
pulsation, tempo, accentuation, appuis, développement rythmique, mesure, carrure, cycle…
mélodie, ornementation, contrepoint, harmonie…
structure, forme musicale…
Hormis quelques exercices fondamentaux très brefs, chaque point abordé l’est toujours dans un souci de réalisation musicale complète par le biais de l’improvisation (le plus souvent collective). L’engagement physique dans le son, aussi fin soit-il, est nécessaire à toute réalisation sonore.
Tout ce travail est dirigé par la pratique, l’écoute et la sensation. L’aspect théorique peut être souligné à posteriori mais pas obligatoirement.
Avec des comédiens ou des chanteurs les éléments précédents sont mis en relation avec des textes et éventuellement une mise en espace : prise de conscience des relations mélodico -rythmiques du texte, synchronisation ou non avec les parties musicales, déplacements dans l’espace en fonction du tempo, du rythme.
Avec des comédiens l’absence éventuelle de connaissances musicales théoriques n’a jamais été un obstacle, d’autant que la langue est déjà musique et que la voix est instrument.
Parcours improvisation
Depuis plusieurs années Frédéric Ligier poursuit un travail autour de l’improvisation, que ce soit avec des musiciens amateurs et professionnels ou bien des comédiens.
Ces ateliers d’improvisation ont été conduits dans des cadres divers tels :
- Ensemble ARMUCOM (musique contemporaine)
- CFMI de l’Université de Rennes 2 (intervenant depuis 1996)
- IFAS (Martinique)
- ENM de Cholet, ENM d’Angoulême, CNR de Rennes, E.M La Flume, E.M de Fougères
- ARTA (Cartoucherie de Vincennes, stage AFDAS et ateliers hebdomadaires depuis 2006)
- Théâtre du Frêne (stage AFDAS)
- CIRAAM (Montréal, oct. 2008)
Ou bien pour la préparation de spectacles :
Musica 2 de P. Drogoz (ms. P. Vincent), Café Noir (ms. J. Clément), Ma fin est mon commencement (ms. J. Bondoux), Bérénice (ms. E. Garraud), Le Cercle de Craie Caucasien (ms. L. Bensasson & J.F. Dusigne), Le Chemin de Croix (lecture : F .Claudel), Voyage en Encyclopédie (ms. P. Longuenesse), Médée Kali (ms. J.F. Dusigne)…
Ce travail d’improvisation a été aussi mené avant des échanges musicaux avec des musiciens d’Inde du nord (CD. A Neemrana Journey, Delhi 1999), des musiciens afghans (spectacle Laylâ et Majnûn, Kaboul 2005) et des danseuses du Kerala (2007, chorégraphie de B. Chataignier).
Depuis 2005 Frédéric Ligier travaille avec le collectif, Les Aléas, qui réunit musiciens et comédiens autour de l’improvisation et de la poésie.
Citations
“Une théorie du rythme est une théorie du sens non parce que le rythme est sens, mais parce que le rythme est en interaction avec le sens. Le poème est le discours où cette interaction est la plus visible. Sans doute aussi celui où elle est la plus spécifique.”
Henri MeschonnicL’art de bien chanter
Bénigne de Bacilly
(1679)
“ Ouvrage très utile
non seulement pour le Chant,
mais même pour la déclamation ”“Mais tout ce qui se rattache à la qualité de la vibration, à la résonance de l’espace et aux caisses de résonances du corps, à la manière dont l’exhalation porte la vibration, tout cela ils ne sont même pas capable de le saisir, au début. ”
Jerzy Grotowski“J’ai toujours eu l’idée d’une scène où la parole et la musique iraient chacune de leur côté et ne s’écouteraient, si je peux dire que latéralement.”
Paul Claudel“ On dirait que le langage a pour limites la musique d’un côté, l’algèbre de l’autre. ”
Paul ValéryDu rythme, comme principe de délectation et d’expression dans la technique de divers arts, et comme donnée naturelle…
“ Chaque mot contient en puissance sa ligne mélodique. En lui surajoutant une ligne mélodique opposée à la sienne, on paralyse son envol et le mot s’écrase sur le plancher de la scène. Ma règle personnelle est de respecter la plastique du mot afin de lui donner toute sa force. ”
Arthur Honegger
“Il faut alors se souvenir des grandes époques de l’art où l’ambiguïté du texte et du son a été authentiquement résolue, quand le poète, tout ensemble écrivain, musicien, ordonnateur des jeux ou des rites de la Cité, ou bien encore crieur public de la Légende, concevait (ou chantait) à la fois son « texte » et sa « musique ». ”
Jean Tardieu
“ Dans la poésie le rôle du sens reste accessoire, il est marginal, il est dans la concordance du rythme. Exemple d’un poème en langue mal connue, l’essentiel est dans l’émotion du récitant. Ce sont des harmoniques supérieurs qui enrichissent un son fondamental.
La Poésie insinue des idées plutôt qu’elle ne les étale, elle suggère plus qu’elle n’exprime. Son but est l’évocation du mystère intérieur, une intensité de rêve qui dépasse l’entendement, l’introduction à un au-delà.
Il ne s’agit pas de raconter un fait ou de faire un enseignement direct.
Ce sont des sonorités verbales sur lesquelles court à peine une légère phosphorescence de signification presque insaisissable.
Il faut investir, combler l’auditeur, pour mettre en branle sa résonance poétique.
Révélation d’une supra-conscience par une certaine musicalité du discours.
Correspondance avec des rythmes vitaux. ”
Louis Jouvet, Le comédien désincarné.
« Le sens trop précis rature
Ta vague littérature. »
Stéphane Mallarmé